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prudence rocaleux

un bébé à retrouver !… Vous devenez une grande détective !

— Vous vous moquez de moi, M’sieu Jacques, et j’suis pourtant bien ennuyée.

La soirée pour elle se passa lugubrement. Elle n’éprouvait nul sommeil et elle tournait comme un toton dans sa cuisine, retardant l’heure de monter dans sa chambre. Elle finit par s’y décider et, bien que son tourment fût vif, elle plongea soudain dans un repos peuplé de rêves saugrenus.

Quand elle se réveilla le lendemain, sa première pensée fut toute d’effroi. Tout le plaisir de son proche voyage s’était envolé, et elle se demandait même si elle devait persister dans ce projet.

Si la police avait besoin de moi ? Quelle affaire ! J’ vas envoyer une dépêche à Mlle Julie… Tant pis ! ma fille, t’es pas faite pour le bonheur ! Tu voulais te reposer un peu, jouer à la dame ! Mais non, tu seras servante toute ta vie… Sitôt que tu veux faire la riche, il survient une aventure.

Elle descendit de sa chambre, comme si une chape de plomb pesait sur ses épaules.

— Ce que le tracas vous abîme tout de même ! J’aurais jamais cru que mes jambes seraient si lourdes ce matin.

Cependant, elle accomplit ses besognes accoutumées sans gémissements.

Mme Dilaret lui demanda dès qu’elles furent seules :

— Avez-vous à peu près dormi ?

— Oui, Madame, avec des cauchemars… Je voyais des diables autour de moi, avec des fourches… Il y avait aussi un corbeau qui se moquait bien fort… et les corbeaux, c’est pas bon dans les rêves… Enfin, arrivera ce qui arrivera… Si je me cassais la tête, personne