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prudence rocaleux

les cerises, les framboises et les semences potagères…

Elle continua donc :

— Y sont plutôt nuisibles… La preuve, c’est qu’on met des épouvantails dans les jardins et les champs pour les empêcher de tout manger. Si on n’y mettait pas bon ordre, nous n’aurions pas de blé…

— C’est bien exagéré ! riposta la jeune femme avec vivacité… Moi, j’aime voir sautiller ces petits diablotins autour de moi… Je vais aller acheter un petit pain.

Elle se leva, sembla hésiter, et Prudence comprit qu’elle aurait voulu lui confier l’enfant, mais qu’elle n’osait pas… Avec élan, elle lui proposa de le garder durant quelques minutes.

— Cela ne vous ennuie pas ? demanda la jeune femme.

— Au contraire !

Le poupon passa dans les bras de Prudence qui le berça, tandis que la mère partait d’un pas vif vers une baraque.

Il y avait près de cinq minutes que Prudence l’avait perdue de vue quand une femme arriva presque en courant et s’écria :

— Madame… donnez-moi vite le bébé de ma sœur… J’ai rencontré Jeanne qui m’a indiqué la place où vous étiez… Elle m’attend là-bas avec mon frère.

D’un geste rapide, la femme prit l’enfant et l’emporta, alors que Prudence n’avait pu prononcer un mot tellement cette scène s’était passée rapidement. Ce fut si précipité que la brave femme resta quelques secondes immobile, les bras dans la pose qu’elle avait en tenant l’enfant.

— Eh ben ! Eh ben !… marmotta-t-elle, en v’là des façons ! J’ suis pas à manières, mais je sais ce qu’est la politesse, et m’enlever le