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prudence rocaleux

erreur en pensant qu’elle voudrait me voir religieuse.

Mme Dilaret sauta en l’air.

— … mais je n’ai pas de goût à ça… Pourtant, je suis assez dévote, mais à ma façon… Être enfermée dans une armoire…

— Une armoire ?

— Leur cellule, c’est quasiment une armoire ! Et puis, y faut prier sans bouger… Non !… y m’ faut de l’exercice… C’est vrai que je pourrais jardiner, mais je n’aime pas ça…

— Ce serait le cas de vous résigner.

— On ne peut tout de même pas se résigner à tout, tant qu’on est pas une sainte… Enfin, peut-être que je me trompe au sujet de cette dame… et qu’elle veut simplement me revoir pour la conversation… Après tout, c’est possible… J’suis quéquefois intéressante qu’ils me disent… Ah ! je deviens une heureuse femme… une amie à la ville… une amie à la campagne… ça fait riche…

— J’en suis contente pour vous ! Comment se nomme-t-elle votre nouvelle connaissance ?

Mlle Parate… Elle habite cours de la Liberté, au-dessus d’un magasin de chaussures… Elle a une chambre et une cuisine, une bonne concierge et des canaris… Y n’en faut pas plus pour aimer la vie.

— Très bien !… Je vous laisse à vos fourneaux… il est tard…

— Tout est prêt… Madame pense que je ne vais pas me promener, sans avoir préparé mon dîner d’avance. Un bon potage, une purée de marrons qui réchauffe et du veau froid avec de la mayonnaise. En surplus, je mets les quenelles, et v’là l’appétit de M’sieu Jacques à l’aise… Il faut nourrir ce grand corps-là, sans quoi ce serait les globules blancs qui le mangeraient…