Page:Fiel - Prudence Rocaleux, 1945.pdf/136

Cette page a été validée par deux contributeurs.
138
PRUDENCE ROCALEUX

vait guère le moyen de résister, parce qu’il avait la main prompte. Maintenant qu’il était parti, elle se croyait tous les courages pour lui tenir tête.

— Cette pauvre sainte, murmura-t-elle encore, n’a pas eu de chance, mais elle aurait pu réclamer un peu… Quand on ne montre pas les dents, les autres s’acharnent sur vous…

Mlle Parate eut encore une fois un mystérieux sourire, et elle répondit :

— Vous ne voulez pas comprendre.

Prudence la trouva bien osée de lui faire une réponse pareille, mais comme elle la trouvait douce et aimable, elle ne voulut pas la brusquer.

Elles revinrent à Lyon par les jardins de Fourvière, et Prudence s’en amusa. Les nombreuses marches qu’il lui fallut redescendre faillirent lui donner le vertige, mais elle se cramponna solidement et ne regarda que le bout de ses pieds.

Elle dit enfin adieu à sa compagne de la journée, et ces dames échangèrent leurs adresses.

Prudence rentra triomphante. Sa cuisine lui parut un palais parce qu’elle y était reine, alors que la fondatrice du Cénacle n’était que l’humble servante de tous, malgré tous ses mérites.

— Elle aurait dû se regimber… C’est peut-être beau d’être humble, mais si tout le monde vous marche dessus, à quoi cela rime ? Avoir un trône dans le ciel, c’est avantageux, je ne dis pas ; mais un compliment sur terre, ça fait du bien !

Prudence parlait tout haut, ses maîtres n’étant pas là. Elle aimait quand sa voix résonnait par l’appartement.

Mme Dilaret revint la première et se dirigea tout de suite vers l’office, ayant à y