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prudence rocaleux

raison… S’il y avait un peu plus de monde dans nos villages, il y aurait moins d’assassins dans les villes…

— Ah ! vous avez du bon sens, Mam’zelle Julie !

— Alors, je vous attends dans trois semaines, prononça Julie après un petit silence, durant lequel elle savoura le compliment que lui décochait son interlocutrice. Il y a un car pour Chalor, c’est très commode… Vous en avez pour une demi-heure… Y a un petit kilomètre à faire à pied ; mais, quand y fait beau, c’est un plaisir… et quand y pleut, il y a un courrier qui passe. Je vous attendrai donc vers le 1er octobre sans faute…

— Entendu !

Prudence s’en alla. Beaucoup de promeneurs encombraient les rues, et elle se croyait à Paris.

Il lui restait encore près d’une heure de liberté, et elle s’amusa aux devantures qu’elle rencontra sur son chemin.

Quand elle fut de nouveau dans sa cuisine, ses pensées la harcelèrent. Elle en voulait un peu à Mam’zelle Julie de lui avoir suggéré que M’sieu Jacques pouvait se moquer d’elle.

Cette pensée assombrissait son après-midi, et elle résolut de s’expliquer avec le jeune homme dès qu’elle en aurait l’occasion. Il était inadmissible qu’on lui racontât des histoires et elle le ferait entendre à ce blanc-bec. Elle ne se comportait pas de façon que l’on se gaussât d’elle…

Jamais, elle ne le tolérerait ! Une fois, dans son jeune temps, alors qu’elle allait à l’école, des galopins lui avaient affirmé que l’on voyait des fées dans un buisson de la plaine. Elle y avait couru, entraînant avec elle des fillettes. Quand elles étaient arrivées et qu’elles attendaient les fées qui devaient leur donner