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prudence rocaleux

Pour écouter la musique, c’est plus commode ; puis, si on s’endort, on est à l’aise…

— Vous avez raison, Mâme Prudence ; mais ce que vous voyez là n’est rien… Si vous désirez voir le reste de l’appartement, j’ vas vous le montrer…

Rien ne pouvait plaire davantage à la visiteuse et elle quitta son siège avec la vivacité d’une jeune fille.

— Voici le salon…

— C’est riche ! Il y en a des ors et des tapis !

— Et encore, les ors sont ternis… Monsieur ne voulait pas qu’on y remette du vernis pour que cela les refasse briller. « Taisez-vous, qu’y me disait, un jour que je lui proposais de badigeonner les places blanchies avec du ripolin doré… Ces meubles resteront ainsi… Ils datent de mon arrière-grand-père, et c’est leur vieillesse qui en fait le cachet… »

— Je ne me fais pas à cette idée qu’ils ont de tant aimer les vieilleries.

— Oui, il y a des choses qui n’entrent pas dans not’ tête… On aime le frais, le neuf…

— Oui… Et le plus fort, c’est que quand nous sommes vieux, nous autres, ils ne nous aiment plus du tout !

— C’est à n’y pas voir clair !

Julie effectuait le tour des chambres, suivie par Prudence qui s’exclamait.

— Celle-ci est celle du défunt monsieur…

Elle parlait bas, en marchant sur la pointe des pieds. Prudence était émue et elle regardait tout avidement. Ses yeux allaient du lit au mur, du plancher au plafond, pour se reporter sur les sièges.

— Y n’y a pas de traces, conclut-elle à mi-voix.

— Non… Ah ! j’ai cherché aussi… et ce que j’ai pu pleurer, en voyant là mon pauvre