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J’accumulais les efforts pour refouler mes larmes.

Il fallait que ma vue fût constamment distraite pour ne pas me laisser submerger par mes pensées.

Enfin, j’atteignis la maison. J’aurais voulu me réfugier dans ma chambre, mais une domestique prévint que Mlle Berthe était au salon.

Elle m’était fort sympathique, mais la voir, lui parler en ce moment était pour moi un gros effort. Je dus l’accepter cependant et, après m’être rafraîchi le visage, je la rejoignis.

Maman causait amicalement avec elle, et, je dois le dire, j’arrivais comme une intruse. On eût pensé, à nous voir, que j’étais l’étrangère et Berthe la fille de la maison.

— Tu as trouvé Mlle Clarseil ?

— Oui, maman.

— Tes fiançailles l’ont enchantée ?

— Je me suis contentée de les lui annoncer sans lui demander son impression.

Maman me tourmentait et je comprenais son ironie. Je ne me montrais qu’une ingrate pour l’existence que l’on m’avait donnée. Ma mère avait toujours eu confiance en moi et me traitait comme une amie. Comment n’aurait-elle pas été déçue par ma conduite ? Elle était persuadée que j’avais noué une intrigue en arrière d’elle et que je m’étais laissé courtiser en subissant une influence qu’elle réprouvait. Elle ne me pardonnait pas ce flirt… que rien dans mon attitude ne faisait supposer.

Elle ne se remettait pas de mon hypocrisie, de ma désinvolture et de mon indépendance outrée. Je la forçais en quelque sorte d’ad-