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beau mariage. Je ne sais comment est ce fiancé que nous verrons demain, mais il ne peut être mieux que Robert Darèle.

Je ne répondis pas. Cette conversation m’anéantissait. Je ne savais plus ni ce que je disais, ni ce que je faisais. Je tournais machinalement ma cuillère dans une tisse, où le breuvage refroidissait.

Mes frères partirent. Papa vint m’embrasser avant de s’en aller, et je resta ; quelques secondes appuyée contre son cœur en bégayant :

— Oh ! papa ! Mon si cher et bon papa !…

Puis nous restâmes seules, maman et moi.

— Quelle désillusion tu me causes ! murmura-t-elle d’une voix rauque.

Je ne pouvais que lui donner raison, sans l’exprimer tout haut.

— Que fais-tu cette après-midi ?

— Je compte rester à la maison

Je suppose que ma chère maman se figurait que j’irais retrouver Jean Gouve, et elle fut étonnée de ma décision.

— Je vais sortir avec Berthe, reprit-elle, lui ayant promis de l’aider pour quelques emplettes. Tu ne veux pas nous accompagner ?

Je refusai parce que j’étais brisée. Tout me paraissait vain autant qu’inutile. Je me faisais l’effet d’être emportée par une cataracte et que ma vie dépendait du saut terrible que j’allais exécuter. Ma pensée ne voyait plus que cet objectif et tout le reste m’était indifférent.

Je répondis négativement, alléguant un malaise que je ressentais réellement