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j’acceptais de devenir sa femme. Sa femme ! Que le mot sonnait mal à mes oreilles ! Mais, tout de suite, je revis le visage transformé de papa, et le courage me revint.

Soudain, un détail me frappa : je ne connaissais pas l’adresse de mon prétendant. Comment l’avertir ? J’eus une seconde joie : cela me donnait du temps. Je n’étais pour rien dans cette étourderie. Ce n’était pas à moi à rechercher cette adresse. Donc, je n’avais qu’à attendre.

Cependant, j’étais inquiète, et, le lendemain matin, en apercevant le courrier, je demandai avec un petit air niais :

— Il n’y a pas de lettres pour moi ?

Vincent rit en répondant :

— À quoi penses-tu, ma pauvre vieille ? Qui est-ce qui t’écrirait, à toi qui n’écris à personne ?

C’était vrai, la correspondance était rayée de mes occupations. Je trouvais que c’était du temps perdu. Le téléphone me suffisait, mais sans doute Jean Gouve ne me relancerait-il pas par ce moyen.

— Oh ! il peut arriver que j’aie une lettre !… une amie peut voyager et penser à moi.

Je répondis cela pour préparer mon public, au cas d’une enveloppe à mon nom. Il fallait songer à tout. Je ris pour donner le change, mais je me disais que je serais bien en peine si je voyais une lettre. Elle susciterait par trop la curiosité de mon entourage. Bien de ce genre n’arriva.

J’allais chez Mlle Clarseil cette après-midi là. Je savourais ce répit avant l’échéance.

Je ne fus pas plus tôt hors de la rue des