Marcelle détourna la conversation en disant :
— Je suis allée chez les cousines, hier…
— J’attendais que tu m’en parles…
— Eh ! bien… elles ont été généreuses… Figure-toi que le bijou consiste en un bracelet-montre…
— C’est magnifique…
— Oui… elles m’ont expliqué que ce bijou moderne leur avait été dévolu comme prime par un joalier à qui elles avaient envoyé une cliente… Cette dame leur a acheté une masse d’argenterie… Mais elles ne veulent pas porter cette montre moderne. D’ailleurs, elle est unique et elles seraient obligées de se la passer à tour de rôle, et préfèrent leur sautoir 1900… C’est plus décoratif… Je suis ravie, mais je n’ai pas voulu afficher ce bracelet à l’atelier, de peur des commérages… C’est un cadran minuscule serti de brillants, oui, ma chère…
— Je suis bien contente pour toi…
Colette était sincère. Elle eût voulu que tout le monde éprouvât de la joie. Un bijou était si peu de chose à côté du bonheur qu’elle tenait serré contre son cœur comme un trésor.
— Oui, je suis enchantée pour toi, répéta-t-elle, et je me réjouis d’admirer ce joyau…
— Oui, répliqua pensivement Marcelle.
Elle oubliait le malaise qu’elle ressentait en marchant si paisiblement à côté de Colette, après l’avoir si cavalièrement fiancée la veille.
Elles arrivèrent devant la porte de Marcelle et Colette lui dit affectueusement :
— Tu es de la famille et ma mère m’a chargée de t’inviter ainsi que ta tante, à venir passer la soirée avec nous… C’est fête à la maison.
— Qu’est-ce qui se passe ? s’inquiéta Marcelle, toute pâle, mordue au cœur par la jalousie.
— C’est l’anniversaire du mariage de mes parents et maman a fait un bon gâteau…
— Ah ! bon, dit Marcelle faiblement. La secousse avait été si forte en pensant que c’étaient peut-être des fiançailles, qu’elle reprenait mal son équilibre…
— Vous viendrez ?
— Naturellement ! nous sommes sevrées de distractions… Tu remercieras ta mère en attendant que nous le fassions nous mêmes.
— C’est entendu ! N’oublie pas de mettre ton beau bracelet… Au revoir… à tout à l’heure…