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CINÉMA !… CINÉMA !…

— Où vas-tu ?

— Mais n’est-ce pas dimanche ? Je vais au cinéma, comme d’habitude.

— Encore !

— Où veux-tu que j’aille ?

— Faire une promenade avec Noémie, par exemple, qui en serait si heureuse.

— Noémie ?… Tu veux rire ! Une sotte pareille qui ne sait même pas ce que signifie un fond de teint !

— Moi non plus !

— À ton âge, c’est permis, m’man ; mais quand on n’a que vingt-cinq ans, comme Noémie, on ne doit rien ignorer de ce qui constitue la beauté. Elle est fagotée comme une étourdie et je ne me montrerai pas dans le quartier avec elle.

— Tout le monde sait qui elle est. Sa réputation de charité, sa complaisance, sont bien établies.

— Oh ! là là ! pour ce qu’elle en récolte !

— Eh ! sa vie n’est pas finie, et le temps de la ré­colte peut venir.

— Je ne la jalouse pas !

— Ce qu’il te faudrait, c’est une leçon.

— Merci !… Au revoir, m’man !

— Cela me peine de te savoir dans cet air étouffé.

— Il n’y a que cet air-là qui me fasse vivre. À propos, où est Maxime ?

— Ton frère est parti depuis une demi-heure, alors que tu t’habillais.

— Il t’a dit où il allait ?

— Peux-tu le demander !

— Oui, je sais qu’il courait au cinéma, mais je voulais savoir dans quelle salle.

— Je n’en sais rien… Il craignait d’arriver en re­tard, parce que c’était un film à épisodes. Ah ! que je déplore l’invention de ce cinéma !

— Ne te désole pas de ce qui fait notre joie. On a quelques heures de rêve, il y fait bon, on a chaud en hiver, on entend rire.