CHAPITRE PREMIER
Claudine s’habillait pour aller au cinéma. Elle se fardait consciencieusement comme si tous les soleils d’Hollywood devaient étinceler sur sa personne. Elle savourait d’avance la délicieuse sensation d’échapper à la monotonie de sa vie, à cette affreuse existence d’ouvrière, à la mesquinerie de l’appartement de ses parents.
Ah ! retrouver les intérieurs somptueux, voir les jolies toilettes des stars, leur aisance, leur facilité à répondre à leurs admirateurs et surtout à ce merveilleux choix d’admirateurs !
Il y avait bien parfois des scènes qui se passaient dans des décors vulgaires, mais on savait que c’était du « chiqué » et que l’éblouissement reviendrait vite.
Claudine eut un soupir… Comment arriverait-elle à se marier selon ses goûts ? Ce qu’il lui fallait, ce n’était pas un de ces commis aux vêtements de confection, à la cravate en soie artificielle ; non, elle avait dans l’esprit un élégant jeune premier à l’éducation parfaite, au visage aimable.
Ah ! ce rêve ! Enfin, au cinéma, elle allait le revivre encore une fois. À force de rêver, croyait-elle, il arrive que l’on force la réalité.
— Maman, je pars.