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ÉPREUVES MATERNELLES

faisait honte à Vincente et elle taisait cet état aux domestiques débutants.

En songeant que Denise pouvait dénoncer cet état de choses et que la justice risquait d’intervenir, les cheveux rares de Vincente se dressaient sur sa tête et ses jambes flageolaient.

Denise ne s’en souciait guère. Échouée dans sa chambre d’hôtel, elle réfléchissait sur son sort, et se demandait quand lui arriverait le repos. Elle se disait que le lendemain, elle avertirait Mme Dutoit qu’elle ne pourrait rester chez elle. Son sommeil fut mauvais, agité par ses souvenirs. Elle avait toujours devant les yeux Mme Cassil, et elle revivait le temps où elle la recevait. Comme ces jours lui paraissaient éloignés !

Chez Mme Dutoit le dîner se passa normalement. Comme sujet de conversation, la maîtresse de maison raconta l’aventure qui venait de lui survenir avec sa cuisinière et ce furent des récriminations sans fin à propos des domestiques sans délicatesse.

Marie Podel obtint le record de la fantaisie et l’on stigmatisa fortement son effronterie et son manque absolu de respect et d’honnêteté qui la conduisait à déserter son poste avant la bataille. Ceci était exagéré, car Marie avait tout soigneusement préparé.

Pendant ces phrases, on savourait l’excellent repas mais sans éloges. Mme Dutoit pourtant remarquait que l’on se servait copieusement et sa gloire de maîtresse de maison en fut flattée.

Le dîner resta très animé par suite de ce sujet intarissable et comme le service fut fort bien fait par la servante d’occasion Mme Dutoit n’eut qu’à se féliciter de posséder un tel thème pour amuser les convives. De temps à autre, cependant, un lancement de terreur traversait son esprit en pensant que le commissaire pouvait surgir, mais elle rejetait rapidement cette hypothèse, en ravivant le sujet touchant sa cuisinière.

Son succès eût été bien plus considérable si elle avait pu dévoiler le nom véritable de Marie Podel. C’est alors que Mme Cassil eût levé les bras au ciel et parlé d’abondance.