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ÉPREUVES MATERNELLES

— Tant mieux, la cuisinière précédente se plaignait toujours quand elle était obligée de leur faire un plat plus léger. Avec vous, cela ira peut-être mieux.

Denise se rapprochait des petits, avec des ruses qui la rendait tremblante.

— Comment vous appelez-vous, mon mignon ?

— Philippe.

— Et vous, petite mademoiselle ?

— Monette.

La jeune femme avait saisi la délicate main de l’enfant et l’embrassait les yeux fermés, comme si elle voulait continuer le rêve qu’évoquait son esprit.

La nurse dit :

— Cela se voit que vous aimez les enfants !… ceux-ci sont gentils et affectueux… Vous allez les garder un peu si vous voulez, pendant que j’irai chercher un autre ouvrage dans ma chambre.

Denise était au comble de la joie.

Dès que la nurse fut hors de la pièce, elle prit Monette sur ses genoux et la couvrit de baisers.

— Ma petite chérie, murmurait-elle, ma Rita chérie…

La petite fille se laissait faire et gazouillait, pendant que Philippe cherchait à attirer l’attention de la jeune femme en lui montrant ses jouets.

Le pas de la nurse s’entendit et précipitamment, Denise remit l’enfant à terre.

Après quelques mots, elle dut retourner dans sa cuisine pour procéder au repas du soir. Ce fut comme une somnambule qu’elle le surveilla, les yeux perdus dans un songe intérieur.

La femme de chambre lui parla, mais sans succès.

— On dirait que tu dors !… tu en es un numéro ! l’existence ne sera pas gaie avec toi !

Denise revint sur terre pour exprimer à la femme de chambre son étonnement de s’entendre tutoyée.

— Cela te déplaît ? répliqua la jeune fille.

— Je suis surprise, n’en ayant pas l’habitude.

— Je suis bonne fille… je te dirai vous, parce que tu me parles poliment et que tu ne parais pas rosse, mais tu me réserveras une grosse part des entremets, j’en ai été trop privée durant mon enfance.

— Bon, c’est entendu, ce sera votre récompense,