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ÉPREUVES MATERNELLES

solennité de la nurse l’impressionnait étrangement, mais ce sentiment s’effaça vite devant la perspective de serrer dans ses bras les deux êtres qui languissaient loin d’elle.

Les deux femmes arrivèrent devant la villa qui abritait les enfants.

Le personnel se composait de la nurse et d’une cuisinière.

À l’appel de miss Ellen, Richard et Rita accoururent et la petite fille reconnut sans hésitation sa mère dans cette femme qui lui tendait les bras. Richard, lui, hésita et finalement, murmura :

— Comme tu es mal habillée, maintenant, maman.

Après cette traduction de son étonnement, il s’élança au cou de sa mère, cherchant à en déloger Rita qui, blottie contre le cœur maternel, n’en voulait pas céder la moindre place.

La nurse considérait ce tableau avec des larmes, et estimait qu’elle n’avait pas à regretter de payer cette joie de la perte de sa place.

Denise n’était plus reconnaissable. Ses traits se transfiguraient. Elle parlait et riait. Les caresses de ses chéris réchauffaient son corps et animaient son être. Elle disait des mots puérils, elle redressait une collerette, lissait une boucle de cheveux, nouait un ruban. Tous ces soins, dont elle était sevrée depuis tant de jours, lui redonnaient une raison de vivre.

Ses enfants la tenaient par la main, et elle allait, entraînée par eux, sur le sable du jardinet, dans le soleil blond.

Elle réapprenait les gestes pleins de grâce et le rire découvrait ses dents blanches.

— Tu ne t’en iras plus, maman ? s’inquiétait Rita.

— Non, ma mignonne.

— Tu sais, appuya Richard, on commençait par trouver le temps long sans toi, ici.

La nurse les suivait, silencieuse. Quand les premières minutes d’exaltation furent passées, elle prononça gravement :

— Madame, je vais partir.

— Chère miss Ellen, combien je vous remercie.

— Je ne sais si Madame doit me remercier… la