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ÉPREUVES MATERNELLES

devoirs au contact de cet esprit qui lui parlait de l’inutilité des plaintes et du peu de cas qu’il fallait faire des ennuis terrestres.

Elle se trouva petite devant tant de détachement. Il lui sembla que son énergie, maintenant revigorée, allait maintenant l’aider à supporter l’existence en souriant.

Son frère sut lui faire ressortir les biens qu’elle possédait : deux enfants bien portants, un nid ouaté. Il lui cita les pauvres femmes des pays qu’il évangélisait, considérées comme des bêtes de somme, et qui n’ont jamais, sur terre, la moindre parole de joie, de ceux qu’elles servent.

Paul Domanet, sans doute, était fier de sa femme. Denise écoutait, son courage recouvré. Elle se sentait devenir meilleure et plus humble. Le léger orgueil qui la conduisait parfois, s’enfuyait de son âme. Elle se promettait de se soumettre à son destin dorénavant, depuis que son frère lui en soulignait les côtés les meilleurs.

Elle se rassérénait. Son visage perdait l’expression morne des jours précédents. D’une compréhension parfaite, le missionnaire la raisonnait, apaisant tous les froissements et pansant les blessures de son cœur.

Elle sortit, la tête fourmillante de bonnes dispositions. Elle rêvait de concorde, résolue à ne plus jamais s’irriter.

Les paroles du missionnaire avaient été si magiques que Denise arrivait à se trouver peu charitable envers son mari.

N’était-il pas un travailleur acharné qui pouvait éprouver des moments de lassitude ? N’était-il pas de par sa prompte réussite un dominateur qui oubliait parfois les formes de la courtoisie ?

Denise voulait oublier tout ce qu’elle avait souffert dans sa sensibilité.

Elle se trouva chez elle. L’heure du déjeuner allait sonner. Elle se hâta de changer de toilette et se rendit dans la salle à manger.

Paul Domanet l’attendait.

Il la regarda. Elle eut un mot gracieux sans s’arrêter à l’ironie des yeux de son mari, et elle continua de parler avec une affectueuse amabilité.