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Marcassol.

— Avec Gustave ! vous preniez des bains avec des Gustave ?

Clarisse. — « 12 Juin — Deuxième bain, toujours avec Gustave. Mer agitée. »

Marcassol.

— On le serait à moins ; pourquoi aussi te laissait-elle prendre des bains avec Gustave, ta mère !… ta mère agitée ?

Clarisse. — Mais ce n’est pas maman, c’est l’Océan !

Marcassol.

— Ah bien ! et Gustave ?

Clarisse. — C’était le baigneur ! Ah ! tiens, voilà le portrait ! mais tu le liras quand je ne serai pas là ! tu te moquerais de moi !… Ah ! qu’il devait être beau ! qu’il devait être parfait ! c’était un de ces maris invraisemblables qu’on ne rencontre qu’une fois par hasard… comme Zizi !

Marcassol.

— Zizi ! Qu’est-ce que c’est que Zizi ?

Clarisse. — Un ami d’enfance !… (avec un soupir) mon premier amour !… j’avais treize ans !

Marcassol.

— Hein ! et il répondait à ton idéal ?

Clarisse. — Ah ! j’avoue que celui-là s’en rapprochait presque !…

Marcassol, à part. — Mais voilà le mari qu’il lui faut !

Clarisse. — Il était si bien ! et puis il avait une très belle position !… il était cinquième clerc d’huissier !…

Marcassol.

— Mais c’est superbe ! on peut devenir huissier sur ses vieux jours ! le voilà celui qu’il faut que tu épouses !… cela devrait déjà être fait !… enfin qu’est-ce qu’il est devenu ?

Clarisse. — Ah ! c’est que je ne sais pas ! un beau jour il est parti… et je ne l’ai jamais revu !

Marcassol.

— Il est parti !… il est parti… qu’importe ! il peut revenir ! il faut le chercher ! il faut faire des fouilles. Il n’est pas possible que nous n’arrivions pas à mettre la main dessus.

Clarisse, étonnée. — Ah ça ! mais on dirait que tu le voudrais !

Marcassol.

— Je le voudrais… pour toi !… c’est pour toi ! qu’est-ce que je veux avant tout, moi ? C’est que tu sois heureuse ! et tu sais bien que tu ne peux pas l’être avec moi… enfin je ne suis pas du tout l’homme que tu as rêvé !…

Clarisse. — Je reconnais que quand je t’ai épousé, tu ne l’étais guère ! moi qui voulais un mari parfait… tu as des défauts…