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Germaine. — Ah ! quelle torture ! On me fait souffrir !

Madame de Sorges - Mais sais-tu que je vais être jalouse de toi ? Faut-il qu’il t’aime, mon René, pour que tu aies une telle puissance sur lui ! Faut-il que tu sois maîtresse de son coeur… Ah ! je t’engage a être fière de ton triomphe, car mon fils t’a fait là un sacrifice qui a dû bien lui coûter. C’est la plus grande preuve d’amour qu’il ait pu te donner.

Germaine. — Hélas !

Madame de Sorges. — Mais cela n’a pas été sans peine, n’est-ce pas ? Dis-moi, la lutte a été bien longue ?

Germaine. — Oh ! oui !

Madame de Sorges. — Pauvre garçon ! Il a tant de cœur ! Ah ! j’avais bien raison, lorsque je ne comptais que sur toi, car il n’y avait que sa fiancée qui pût emporter sur lui une telle victoire. Quand l’amour s’en mêle, il faut plier les armes. Ah ! Germaine tu l’aimes donc bien, mon René ?

Germaine. — Oh ! oui, je l’aime !

Madame de Sorges. — Et tu seras heureuse quand tu seras à lui. Encore quinze jours et vous vous appartiendrez tout à fait !

Germaine. — Tout à fait… Oh Dieu et si tout à l’heure. Oh ! non ! assez, assez !

Madame de Sorges. — Quoi ?… Qu’as-tu

Germaine. — Moi Rien ! Rien ! (à part) Ah ! j’étouffe !

Madame de Sorges. — Mais si ! tu as l’air inquiète, agitée… Est-ce que tu n’es pas contente de René ?

Germaine. — Si ! Si !

Madame de Sorges. — Alors, explique-moi !

Germaine. — Non rien !… Attendez, chut !… (Elle remonte vers la fenêtre.) Non j’avais cru entendre, oh ! mon Dieu, mon Dieu !

Madame de Sorges. — Mais enfin, qu’est-ce que tu as, voyons ! tu as quelque chose !

Germaine, très agitée. — Moi, non… non…

Madame de Sorges. — Regarde-moi, tu détournes les yeux. (Subitement.) Oh ! mon Dieu ! quel pressentiment !

Germaine. — Oh ! non, non !

Madame de Sorges. — Germaine, tu m’as menti !

Germaine. — Moi !

Madame de Sorges. — Tu m’as menti ! René se bat !