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Marcassol.

— Ah ! vous préférez ! C’est bien ! je vous flanque à la porte !…

Trémollet.

— Voyons, monsieur, encore huit jours, dans huit jours je touche… Et puis le métier va si mal…

Marcassol.

— Quel métier ?

Trémollet.

— Monsieur sait bien, sous-secrétaire aux placements désespérés.

Marcassol.

— Qu’est-ce que c’est que ça ? Encore une banque ?

Trémollet.

— Mais non, l’agence matrimoniale.

Marcassol.

— Ah ! c’est vrai, l’agence matrimoniale ! Vous faites des mariages ! Un joli métier !… C’est du propre !…

Trémollet.

— Mais Monsieur…

Marcassol — Eh ! vous croyez que je vous donnerai des sursis, que j’aurai pitié de vous, d’un monsieur qui fait des mariages, un marchand de chaînes, un fabricant de boulets… Ah ! oui… c’est une belle institution que votre mariage, parlons-en !

Trémollet.

— Ah ! mon Dieu !

Marcassol.

— Ah ! si encore ces chaînes pouvaient se rompre, ces boulets se détacher… Si vous pouviez les défaire, ces mariages que vous infligez….

Trémollet.

— Hélas ! c’est impossible, monsieur !…Nous ne fournissons que des maris.

Marcassol.

— Des maris ! des maris ! une belle marchandise !

Trémollet.

— Mais nos maris sont très convenables pour tous les goûts et les tempéraments ! Il n’y a pas une femme qui ne puisse trouver chez nous l’homme qu’elle a rêvé.

Marcassol, frappé. — Qu’elle a rêvé ! Qu’elle a rêvé ! Ah ! mon Dieu !…

Trémollet.

— Qu’avez-vous ?

Marcassol, à lui-même. — Mais oui, cela arrangerait tout !… si jamais je trouve l’homme de mes rêves, je vous rends votre liberté !… Elle me l’a dit. Eh bien ! cet homme…

Trémollet.

— Quoi donc ?

Marcassol.

— Cet homme qu’elle n’a pas trouvé, je pourrais le lui trouver, moi… et alors… plus de femme ! la liberté, la Comtesse, tout ! tout !… (à Trémollet) Ah ! Trémollet, mon ami ! (Il lui serre la main.)