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Jenny.

— C’est bien je m’en vais !… mais à la place de Madame… je me méfierais…


Scène XII

Edgard, Clarisse

Edgard, avec reproche. — Ah ! Clarisse !

Clarisse. — Vous !… vous ici !… mais, ah çà ! d’où sortez-vous donc ?… d’où revenez-vous ?

Edgard. — D’Amérique, Madame !… et si j’ai un regret, c’est de ne pas y être resté ; pour apprendre ce que je viens d’apprendre ! votre trahison !…

Clarisse. — Ma trahison ?

Edgard. — Je sais tout !… ainsi vous êtes mariée !… Ah ! perfide !…

Clarisse. — Des reproches ?… En vérité j’admire votre audace ! M’accuser, quand c’est vous qui m’avez quittée !… Brusquement, sans raison !… quand c’est vous qui êtes parti…

Edgard. — Eh ! je suis parti… je suis parti… j’y étais forcé, moi ! J’ai été recueillir un héritage, toucher le montant de la fortune d’un oncle…

Clarisse. — C’était pour cela ?… Eh ! pouvais-je le deviner ? pourquoi ne m’en avez-vous pas prévenue ?

Edgard. — Mais pour vous en garder la surprise ! Je me disais : elle ne se doute de rien ! elle me croit toujours le petit saute-ruisseau d’autrefois, sans fortune !… Mais quand elle saura que je suis riche !… car je suis riche, riche maintenant ! il n’y aura plus d’obstacles ! On ne pourra pas me refuser ! Je repars pour la France radieux, plein d’espoir… et quand j’arrive, je vous trouve mariée à un autre ! mais cela ne peut pas se passer comme cela ! Je lutterai !

Clarisse. — Vous lutterez ?

Edgard. — Oui !… je suis décidé à tout ! et pour commencer, je viens vous enlever !

Clarisse, riant. — M’enlever !… Comment, m’enlever ?…

Edgard. — Croyez-vous que je vais vous laisser à ce misérable ?