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Follentin. — Oh ! j’y suis, c’est le club des Bilboquets.

Madame Follentin qui a mal entendu. — Des pick-poquets ?

Follentin. — Bil ! Bilboquets !

Marthe. — Mais oui, mère, c’est le jeu qu’on vient d’inventer pour Henri III… plus tard.

Madame Follentin. — Ah ! j’ai eu une émotion !

Les Conjurés voyant entrer la patrouille se mettent à jouer au bilboquet tout en sifflotant entre leurs dents l’air du langage chiffré. Passe la patrouille, torches en mains.

Follentin pendant que les autres sifflotent. — Eh ! bien, tiens ! tu es servie à souhait.

Marthe. — Toi qui te plaignais qu’on ne voyait pas clair dans les rues.

Follentin. — Patrouille du temps, ma chère ! Crois-tu que ça en a, un caractère !

Sortie de la patrouille.

Madame Follentin. — Oui, mais on ne peut pas dire qu’elle éclaire longtemps.

Follentin. — Ah ! Tu n’es jamais contente !

Les conjurés qui, tout en sifflotant, sont remontés pour s’assurer que la patrouille est bien partie, redescendent.

Follentin, parlé sur la musique. — Je vous demande pardon, si nous sommes là en badauds ; je vous écoutais tout à l’heure.

Premiers Conjurés, terribles. — Vous nous écoutiez ?

Les Follentin. — Hein !

Deuxièmes Conjurés. — Vous nous épiez !

Follentin. — Moi ?

Marthe et sa mère. — Nous ?

Premiers Conjurés, marchant sur eux. — Cinq, vingt-huit, neuf, douze.

Deuxièmes Conjurés (id.). — Un, trois, deux, zéro, trente.

Madame et mademoiselle Follentin (enserrées entre eux). — Papa, Adolphe, ne nous quitte pas.

Tous les Conjurés. — Trois-cent-sept, neuf, huit, sept, un, deux trois, zéro, vingt.

Follentin. — Je vous assure, Messieurs.

Tous les conjurés. — Six, huit, sept, un, deux, trois, dix-neuf, cent-huit, quarante quat’quat’quat’un, sept, huit, dix-neuf, cent, trente et un.

Tous les Conjurés. — Couic !

Deuxièmes Conjurés. — Couic !

Premiers Conjurés. — Et si vous répétez un seul mot de ce que vous avez entendu, vous êtes morts.

Follentin. — Morts ?

Tous. — Morts !

Madame Follentin et Marthe. — Dieu !

Comme précédemment, ils reprennent leur air siffloté et rentrent ainsi dans l’Hôtellerie où les accueille La Hurière qui les fait descendre dans une cave et disparaît avec eux.