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Paulette. — Eh ! bien, quoi ?

Serge. — Poivrot, l’homme d’Amérique qui laisse cent millions !… Son héritier, c’est lui ! (Il désigne Isidore puis tombe assis sur une chaise.)

Tous. — Hein !

Paulette. — Cent millions ! il hérite… ah ! ah !

Elle tombe dans les bras d’Actinescu.

Serge, se levant. — Allons bon ! elle aussi !

Actinescu, soutenant Paulette. — Madame ! Madame !

Paulette, ouvrant les yeux. — Non, non, ce n’est rien ! un étourdissement ! ça va bien… cent millions ! cent millions ! et vous le laissez là, par terre.

Mittwoch. — Mais oui ! mais oui ! mettez-le sur une chaise longue !

Snobinet. — Mais il n’y en a pas !

Mittwoch. — Ça ne fait rien, trouvez-en !

Serge. — Celle de la chambre ! attendez, je vais vous aider.

Paulette. — Mais allez ! allez ! un peu d’humanité ! on n’a pas idée d’abandonner un malheureux comme ça !

Mittwoch. — Un malheureux qui a cent millions.

Actinescu. — Tenez, voilà un fauteuil !

Mittwoch. — Un fauteuil ! un fauteuil ! est-ce que c’est assez un fauteuil !

Paulette. — Mon flacon de sels, mes sels ! où sont mes sels ?

Serge, apportant la chaise-longue, aidé par Snobinet. -Voilà la chaise-longue.

Paulette. — Bon ! mettez-la là !… là ! deux hommes, prenez-le bien doucement !

Actinescu. — Attendez !

Il le prend par-dessous les bras, Snobinet par les jambes.

Paulette. — Mais, espèce d’andouille !… euh ! je veux dire, monseigneur… vous ne voyez pas que vous le secouez ?

Actinescu. — Pardon !

On le pose sur la chaise-longue.

Paulette, l’éventant avec une serviette. — Isidore !… mon petit Isidore !… Isidore.

Isidore, se réveillant, d’une voix lointaine. — Quoi ?

Mittwoch. — Il revient à lui.

Tous. — Oui.

Isidore. — Qu’est-ce qu’il y a eu ? Pourquoi suis-je ici ?

Paulette. — Isidore ! mon petit Isidore !

Isidore, voix mourante. — Madame ! (Soudain.) Ah ! oui, la lettre ! Ah ! mon Dieu ! dites-moi que je n’ai pas rêvé !

Mittwoch. — Isidore… du courage !…

Isidore. — Hein ! j’ai rêvé ?

Tous. — Non ! non !

Mittwoch. — Vous héritez de cent millions !

Isidore, se levant d’un bond. — Cent millions ! J’hérite de cent millions !

Paulette. — Isidore ! Mon petit Isidore !

Isidore. — Où sont-ils ? Où faut-il aller pour les chercher ?

Mittwoch. — Venez ! le notaire vous attend. (Lui tendant la lettre.) Voici son adresse ! allez ! courez !