Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 3, 1948.djvu/13

Cette page n’a pas encore été corrigée

Justin, se rapprochant d’Eloi. — Non… il est, comme on dit, sous l’influence du sommeil hypnotique.

Eloi. — Il a l’influenza.

Justin, à Boriquet. — Allons, arrive ici, toi, moule à gaufres ! (Il dirige Boriquet jusqu’au milieu du théâtre en le guidant avec le doigt.) : Lève la jambe !… l’autre ! (Boriquet exécute successivement tous les ordres donnés par Justin.) Baise ma main ! Bien !

Eloi. — Il est tout de même bien dressé, savez-vous.

Justin. — Là, maintenant tu est une jolie femme… n’est-ce pas que tu es une jolie femme ?

Boriquet. — Oui, oui, je suis une jolie femme !

Il gagne l’extrémité droite.

Justin, à Boriquet qui exécute en pantomime tous les ordres donnés, toujours en le guidant avec le doigt, devant les yeux de Boriquet, lesquels doivent être fixes. — Là, promène-toi, ma vieille… là, bien… Ah ! un ruisseau… prends garde à ta robe !…

Boriquet fait mine de retrousser sa robe et d’enjamber le ruisseau. Il enjambe la malle. Justin le fait tourner et doit se trouver au 3.

Eloi. — Ah ! il est rigolo, par exemple.

Justin. — Voilà une fleur, tiens… une belle fleur.

Il lui tend le plumeau qu’il a été chercher sur la cheminée à droite, premier plan.

Boriquet. — Hou ! ça sent bon…

Il respire le plumeau avec une satisfaction évidente.

Justin. — Hein, n’est-ce pas ?

Boriquet. — C’est du géranium..

Justin. — Tu l’as dit… (Il parle à Eloi devant Boriquet.) Hein ! crois-tu qu’on lui fait prendre des vessies pour des lanternes.

Eloi. — Pour sûr !

Justin, à Boriquet. — Là, rends-moi ta fleur… Allons, veux-tu… C’est qu’il ne veut pas me la rendre…

Il reprend le plumeau qu’il remet dans le coin de la cheminée.

Eloi, au public. — Fleuriste, va !…

Justin, il revient à Boriquet en tendant la main. — Et maintenant tu as assez fait le singe ! donne-moi vingt francs ! (Boriquet tire vingt francs du gousset de son gilet et donne la pièce à Justin, très automatiquement.) Parfait, eh bien, pour ta peine, prends cette malle et porte-la dans la chambre bleue… quand ce sera fait, tu reviendras. : . Allez, ffutt !… (Il lui envoie un coup de pied au bon endroit. A Eloi, pendant que Boriquet sort en emportant la malle.) Voilà ce qu’on appelle les sciences occultes.

Eloi. — C’est drôle, moi j’aurais plutôt appelé ça, les coups de pied occultes.

Scène III

Les Mêmes, moins Boriquet

Justin. — Eh ! bien qu’est-ce que tu en dis ?

Il vient s’asseoir sur la chaise qui se trouve entre la