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le voilà !…" Ah ! il faudra que… (Elle fait signe d’agiter son mouchoir.) C’est lui qui donnera le signal… Non… je me fais un scrupule… après ça… je lui dirai de ne pas agiter trop fort… ça atténuera… (Lisant.) "Vous m’indiquerez l’heure, par autant de raies que vous tracerez à la craie sur son dos…" Oh ! non… ça, non… Je n’oserai jamais… rayer mon mari. (S’asseyant sur le canapé. Lisant.) "À propos, j’ai bien trouvé des jarretières… mais on demande la mesure !…" (Parlé.) Décidément, il doit être actionnaire dans une fabrique…

Amandine, entrant de gauche, deuxième plan. — Marthe !… Elle n’a dû rien comprendre… Il faut que j’en aie le cœur net !…

Marthe. — Bibiche !…

Mouvement d’embarras. Marthe s’écarte un peu sur le canapé pour faire une place à Amandine.

Amandine, minaudant en se trémoussant pour se mettre à l’aise. — Comme vous tenez de la place…

Marthe. — Moi ?…

Amandine, s’installant. — Ah ! là ! c’est bien. (Moment de silence.) Euh !… vous avez vu mon mari ?…

Marthe. — Mais oui… en effet…

Amandine. — Il a dû vous remettre un billet…

Marthe. — Hein ?… Comment savez-vous ?

Amandine. — Je le sais, parce que je l’ai eu entre mes mains.

Marthe. — Ah !… vous l’avez… (À part.) Il est donc fou, ce Dufausset… on n’a pas idée de faire faire la chaîne, avec ces choses-là !…

Amandine. — Oh !… vous savez… ce billet… je ne l’ai pas lu…

Marthe. — Ah !… vous !… Je respire…

Amandine. — Pas plus que vous, j’espère…

Marthe. — Moi !… mais pour qui me prenez-vous ?… Je ne lis pas les billets…

Amandine. — C’est comme moi, j’ai des principes…

Marthe, à part. — Elle ne se doute de rien… je suis sauvée !

Amandine, à part. — Elle n’a rien vu… je suis tranquille… (haut,)… Mais ce billet ?…

Marthe. — Je l’ai déchiré… Que vouliez-vous que j’en fisse ?

Amandine. — Ah !… Vous auriez pu me le remettre.

Marthe, à part. — Tiens ! Voyez-vous ça… (Haut.) J’ai trouvé plus digne de le déchirer.

Amandine, à part. — Après tout… je m’en moque… Je l’ai lu… (Haut.) Dites donc, c’était sans doute quelque déclaration d’un amoureux timide ?…

Marthe, minaudant. — Ce billet ?… Oh ! Non !…

Amandine, minaudant. — Et si… si… quoi,… on n’est pas responsable des sentiments que l’on inspire.

Marthe. — Oh !… oui.. Mais non… vous vous illusionnez… c’est inadmissible.

Amandine. — Hein ?… Pourquoi donc, s’il vous plaît ?…

Marthe. — Il faudrait que cet amoureux ne fût pas difficile !… L’objet n’en vaut vraiment pas la peine.

Amandine. — L’objet… En voilà une façon… Et comment ça, pas la peine ?…

Marthe. — Merci… C’est gentil ce que vous dites là… Mais il n’y