Armandine. — Quoi ! Tu ne vas pas me refuser de lui donner cent sous !
Elle s’asseoit à gauche.
Rédillon. — Evidemment ce n’est pas pour les cent sous… Mais enfin, vraiment !… (Tendant une pièce de cinq franc à Victor.) C’est bien, voilà cent sous pour cette fois, mais que cela ne vous arrive plus.
Il passe à droite.
Victor, sèchement. — Merci. (Empochant et entre ses dents.) Cochon !
Rédillon, qui n’a pas entendu. — Je suis comme ça, moi !
Victor, la voix tendre, à Armandine. — Madame, je vais chercher la femme de chambre pour qu’elle m’aide à porter la malle !
Armandine, assise à gauche. — C’est ça, va, petit !
Victor sort.
Rédillon, grommelant. — Au moins, il saura ce qu’il en coûte de me parler impoliment.
Armandine. — Ah ! bien, ce pauvre petit, il ne faut pas lui en vouloir. Il est énervé en ce moment, il est malade.
Rédillon. — En voilà une raison ! Je m’en fiche, moi, qu’il soit malade !…
Armandine. — Si tu avais ce qu’il a !
Rédillon. — Qu’est-ce qu’il a donc ?
Armandine. — Je ne sais pas bien ce que c’est ! Il paraît qu’il a de la puberté !
Rédillon. — De la puberté ! Comment, de la puberté !
Armandine, appuyée sur le bras du fauteuil. — Parfaitement ! C’est le médecin qui l’a dit !
Rédillon. — C’est ça, sa maladie ?… Ah ! bien vrai, je vais le plaindre !
Armandine. — C’est grave ?…
Rédillon. — La puberté ? Ah ! oui !
Armandine, se levant tout à fait. — Ca ne se gagne pas au moins ?
Rédillon. — Oh ! non, malheureusement ! Sans ça, cristi ! v’là un virus qui vaudrait de l’argent.
Victor, entrant, à Clara qui le suit. — Tenez, aidez-moi !
Clara. — Cette malle-ci ?
Victor. — Oui, à la descendre au 17… (Revenant prendre le sac sur la table.) Ah ! le sac !…
Ils emportent la malle et le sac.
Rédillon, allant à elle. — Ah, çà ! tu déménages donc ?
Armandine. — Oui, cette chambre ne me plaît pas. J’en ai demandé une sur la rue.
Rédillon. — Je ne vois pas ce qu’il y a de plus agréable à être sur la rue. Enfin, va pour la nouvelle chambre. Allons dans la nouvelle chambre.
Il va prendre son chapeau sur la cheminée.
Armandine. — Nous ? pourquoi faire ?
Rédillon, descendant. — Comment, pourquoi faire ? (Malicieusement.) T’es bête.
Armandine. — Oh ! non, non, mon ami, non, pas ce soir !
Rédillon. — Quoi ?
Armandine. — Oh ! il n’y a pas de "quoi" ! (Passant à droite.) Impossible, mille regrets !