Page:Feydeau - Théâtre complet, volume 1, 1948.djvu/250

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Follbraguet. — Oui, eh bien ! voilà ce que j’en fais de ta clef, je la fiche au feu !…

Il l’envoie à toute volée dans la cheminée.

Marcelle. — À ton aise !…

Follbraguet. — Tu sais ce que tu m’amènes avec tes histoires ?

Marcelle. — Je ne suis pas curieuse de le savoir.

Follbraguet. — J’ai un duel avec mon domestique !

Marcelle, ironique. — Voyez-vous ça ?

Follbraguet. — Il n’y a pas de « voyez-vous ça » !… Comme Adrien est fiancé à Hortense et que tu l’as insultée, il m’en demande raison.

Marcelle. — Très bien ! C’est très bien ! ça prouve qu’il n’est pas comme certaines gens. Quand on insulte sa femme, il prend fait et cause pour elle ! ce n’est pas un pleutre !

Follbraguet. — Oui, eh bien ! en attendant, tu as offensé Hortense, tu vas me faire le plaisir de lui faire des excuses.

Marcelle. — Moi ? eh ben !

Follbraguet. — Et séance tenante.

Marcelle. — Pourquoi ? T’as peur !

Follbraguet. — Qu’est-ce que tu dis, espèce d’idiote ? Et puis, en voilà assez. Je suis le maître et j’exige.

Paraît Adrien qui s’arrête sur le pas de la porte.

Marcelle. — Ah ! « tu exiges » ! tiens !

Elle lui envoie un soufflet.

Follbraguet. — Oh !

Marcelle. — Monsieur exige !

Elle sort de gauche.

Follbraguet, à Adrien. — Eh bien ! voilà, mon ami, quand je montre de l’autorité. Voilà !

Adrien. — Ah ! évidemment… quand il faut remonter un courant…

Follbraguet, exaspéré. Oh ! non ! non !

Adrien. — Ah ! mais, Monsieur a toute la journée devant lui…

Follbraguet. — Ah ! fichez-moi la paix !…

Adrien. — Y a le monsieur que Monsieur a déjà soigné aujourd’hui qui revient.

Follbraguet. — Quel monsieur ?

Adrien. — Celui qui était là juste avant la dame qui venait pour son « mniam, mniam, mniam ».

Follbraguet. — Ah !

Adrien. — Il paraît qu’il a toujours mal.

Follbraguet. — Bon ! bien !… eh ! bien !…


Scène IX

Les mêmes, MARCELLE, la CUISINIÈRE

Marcelle, entrant du fond à gauche. — Et maintenant je t’amène la cuisinière.

Follbraguet. — Quoi ? quoi ? la cuisinière.

Marcelle, à la cuisinière qui, dans le vestibule, est visible, dans l’embrasure de la porte. — Allez, allez, entrez, ma fille ! (À son mari, pendant que la cuisinière entre.) Puisqu’il est entendu que je ne suis plus rien dans la maison…