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Finette.

Ah ! je souffre autant que vous, et j’ai plus besoin d’appui que de reproches. Ah ! si seulement vous aviez un peu de fortune !

Bouvard, la repoussant.

C’est vous qui me parlez ainsi !… C’est vous qui êtes capable de pareils calculs !… Mais est-ce que j’y regarde, moi, à la fortune ?… Je n’en ai pas, moi. Mais du moment qu’il y en a un des deux qui en a, c’est tout ce qu’il me faut.

Finette.

Mais ce n’est pas pour moi que je vous demande ça, c’est pour papa.

Bouvard.

Ah ! papa !… Voilà le grand mot, papa !

Finette.

Il ne me donnera jamais à un peintre sans clientèle.

Bouvard.

Eh ! bien, je lui vendrai mes tableaux, à papa. Si vous saviez comme c’est pénible aujourd’hui. Dire que j’en suis réduit à faire des silhouettes pour cent sous au Jardin de Paris. Le monde est si peu artiste !… Un tableau magnifique, verni, encadré, ignifugé,… on m’en a refusé deux cents francs… et encore on m’a demandé de le signer Trouillebert.

Finette.

Ah ! travaillez, monsieur Bouvard ! Si vous pouviez seulement n’obtenir que la première médaille au salon, ce serait une promesse pour l’avenir.

Bouvard.

Mais, sacristi ! l’argent ne fait pas tout… et votre père est bien assez riche. Après tout, quelle est donc la fortune de votre prétendu ?

Finette.

M. Saboulot ! oh ! lui, c’est autre chose. D’abord il a une tante qui est très riche. Et puis, surtout, c’est un savant, un professeur de physique… et comme papa n’a jamais pu avoir son brevet de grammaire, il croit que ce mariage le posera.