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Camors ouvrit ses bras, et, se penchant comme s’il était près de s’agenouiller :

— Venez m’embrasser, je vous en prie ! murmurat-il.

L’enfant s’avançait déjà en souriant, quand la femme qui le suivait, et qui était son ancienne nourrice, parut soudain. ;

Elle fit un geste d’effroi.

— Votre père ! dit-elle d’une voix étouffée.

A ce mot, l’enfant poussa un cri de terreur, se rejeta violemment en arrière et se pressa contre cette femme en attachant sur son père des yeux épouvantés. La nourrice le prit par le bras et l’emmena à la hâte.

M. de Camors ne pleura pas. Une contraction affreuse rida les coins de sa bouche et fit saillir la maigreur de ses joues. Il eut deux ou trois secousses pareilles à des frissons de fièvre. Il passa lentement la main sur son front, soupira longuement, et partit.

Madame de Campvallon ne connut point cette triste scène ; mais elle en vit les suites, et elle les sentit elle-même amèrement. Le caractère de M. de Camors, déjà si profondément bouleversé, devint méconnaissable. Il n’eut même plus pour elle la politesse froide qu’il avait gardée jusque-là. Il lui témoignait une antipathie étrange. Il la fuyait. Elle s’aperçut qu’il évitait de lui toucher la main. Ils ne se virent plus que rarement, la santé de Camors ne lui permettant plus de repas réguliers.