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heureuses… Mon Dieu ! qu’il fait bon vivre quelquefois !

Je n’avais pas vu madame de Louvercy depuis plusieurs années. Elle a étonnamment vieilli. Ses cheveux sont devenus tout blancs, et encadrent, du reste, à merveille son beau visage douloureux. Elle a sous les yeux deux sillons bleuâtres que les larmes ont certainement creusés. Elle parle peu de ses chagrins, et le plus souvent par allusion. Je l’entendais, chemin faisant, conter à ma grand’mère comment le malheureux état de son fils l’avait absorbée longtemps tout entière ; mais elle avait dû se souvenir enfin que Cécile n’avait plus sa mère, et qu’elle avait aussi des devoirs envers elle. Tout cela était dit sur le ton d’une réserve extrême, sans appuyer, et avec un sourire de bon accueil, très-touchant sur