demande bien pardon à ces dames, mais c’est tout à fait le contraire. Puisque mes chères maîtresses s’y sont méprises, il n’est pas étonnant que le monde s’y trompe de même. Je me figure que mon apparence extérieure est la cause de ces faux jugements. Je suis très-brune et pâle ; mon visage, d’une correction ennuyeuse, est aussi sévère que peut l’être un jeune visage féminin. Une myopie assez prononcée prête une expression d’indifférence endormie à mes yeux noirs (dont l’éclat, sans cette fâcheuse circonstance, serait certainement insoutenable). De plus, j’ai naturellement une manière tranquille de parler, de marcher, de m’asseoir et de ne pas faire de bruit, qui achève de donner à l’observateur l’illusion d’une sérénité impassible. Je n’ai aucun désir et je n’ai aucun moyen de
Page:Feuillet - Le Journal d'une femme, 1878.djvu/16
Cette page a été validée par deux contributeurs.