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grand feu de bivouac, autour duquel quelques officiers s’entretenaient à voix basse d’un air morne… Des bruits de capitulation couraient depuis la veille dans les camps… Le colonel, qui était un homme déjà mûr, à moustaches grisonnantes, allait et venait solitairement à quelque distance en froissant dans sa main l’ordre que je lui avais apporté. — Tout à coup, il s’approcha de moi et me saisit le bras :

« — Capitaine, me dit-il avec l’accent d’un homme qui va en provoquer mortellement un autre, deux mots, je vous prie !… — Vous venez du quartier général… vous devez en savoir plus long que moi… C’est la fin, n’est-ce pas ?

» — Mon colonel, on le dit, et je le crois.

» — Vous le croyez ?… Comment pouvez-vous croire une chose pareille ? »