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ANNE DE MARQUETS

ne sont pas de l’invention de Malherbe, qui depuis en a fait de si belles et de si pompeuses, mais qu’elles étaient en usage longtemps avant lui. »

Par un autre travail, Anne de Marquets a payé tribut à la suprématie dont jouissait parmi nous la littérature italienne ; c’est en traduisant les œuvres sacrées du célèbre Flaminio, qui, avec le goût enthousiaste du siècle pour les souvenirs et les noms romains, se faisait appeler Marcus Antonius Flaminius[1]. Elle publia en 1569 cette traduction en vers, et l’offrit, suivie d’un choix de ses propres poésies, à Marguerite, la sœur du roi Charles IX. Enfin à sa mort, qui arriva en 1588, elle laissa, sur les dimanches et sur les principales fêtes, des sonnets spirituels qui furent imprimés en 1605, à Paris, avec une préface d’une de ses compagnes en religion, Marie de Fortia. Ce n’était d’ailleurs qu’une traduction des collectes qui se lisent dans l’église, et cette application singulière de la poésie suffit pour caractériser l’époque. Temps d’heureuse naïveté, où la reconnaissance d’un lecteur facile était assurée à l’auteur, où les veilles, les tentatives des poëtes, inspirés ou non, trouvaient toujours des mains prêtes à les applaudir et des bouches pour les répéter, où la critique, avec ses exigences et ses malveillances, n’était pas née, où presque tous les efforts étaient récompensés par la gloire !

Deux ans avant de mourir, Anne de Marquets était

  1. Il a été déjà question de ce poëte dans l’étude sur Scévole de Sainte Marthe, Caractères et portraits littéraires du seizième siècle, tome I, page 445.