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MADELEINE NEVEU

leur vie, ce fut en effet la régularité ; leur inspiration commune eut sa source dans les sentiments les plus purs, dans les affections les plus légitimes du cœur humain. L’une paraît n’avoir connu qu’un seul amour et le plus saint de tous, l’amour maternel, tandis que la muse de l’autre fut surtout sa piété filiale.

La capitale du Poitou, qui se piquait de partager avec la Touraine et l’Orléanais le goût des lettres, fut la patrie de Madeleine Neveu. Elle naquit en 1530, au sein d’une famille assez considérable ; et cet avantage, uni chez elle à celui de la beauté, la fit rechercher de bonne heure en mariage. Très-jeune encore, elle devint la femme d’un gentilhomme breton estimé pour son savoir, François de Fradonnet, seigneur des Roches, qui s’établit à Poitiers. Il avait trente ans, et mourut dans sa cinquante-huitième année : c’est ce qu’on apprend par des vers funèbres que sa veuve composa en son honneur.

Malgré la convenance et la paix de cette union, Madeleine ne devait pas, à en juger par ses poésies, connaître tout le bonheur dont elle était digne. Le désenchantement y perce en plusieurs endroits, et le souvenir même de la jeunesse réveille en elle des pensées de déception et d’amertume ; témoin ces paroles :


Les plus beaux jours de nos vertes années
Semblent les fleurs d’un printemps gracieux…
Pressé d’orage et de vent pluvieux…


La vive sensibilité qui explique ces plaintes se