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GABRIELLE DE COIGNARD.

Mais qui sera témoin de l’ennui que je sens ?
Ce sera toi, Seigneur, espoir des innocents,
Support des orphelins et l’appui de la veuve !

Tu daigneras sécher les larmes de mes yeux,
Apaisant de mon cœur les regrets soucieux,
Donnant à mes combats ou la paix ou la trêve[1].


Ce fut en 1594 que mourut Gabrielle de Coignard, vers le moment où Paris ouvrait ses portes à Henri IV, et à la veille du dix-septième siècle, dont ses vers, en plus d’une rencontre, annoncent la gravité noble et soutenue. En somme, un style sain et d’une élévation naturelle recommande généralement les productions de cette dame, que le P. Hilarion de Coste et le P. Jacob n’ont eu garde d’omettre dans leurs Histoires des femmes illustres, mais dont les recueils plus modernes ont injustement, ce nous semble, négligé le nom. Ses œuvres, comme son nom, ont mérité de survivre ; et il est permis d’y voir un curieux témoignage de cet esprit calme et posé qui allait succéder aux agitations de la renaissance, et pacifier, pour quelque temps du moins, les domaines de la politique comme ceux de l’intelligence.

  1. On écrivait alors veſve et treſve : pour les yeux comme pour l’oreille cette rime était donc régulière.