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PERNETTE DU GUILLET

qui porte le titre d’Adonis, mais il est trop étendu pour être cité ; bornons-nous à donner une pièce plus courte où elle remercie un auteur en crédit de l’avoir chantée le premier :


Par ce dizain clairement je m’accuse
De ne savoir les vertus honorer,
Fors du vouloir, qui est bien maigre excuse ;
Mais qui pourrait par écrit décorer
Ce qui de toi se peut faire adorer ?

Je ne dis pas, si j’avais ton pouvoir,
Qu’à m’acquitter ne fisse mon devoir,
À tout le moins du bien que tu m’avoues :
Prête-moi donc ton éloquent savoir,
Pour te louer ainsi que tu me loues.


Dans une autre pièce, intitulée Parfaite amitié, Pernette du Guillet, parlant sans doute à ce même poëte, exprime avec une naïveté qui n’est pas sans agrément le désir qu’elle éprouve d’être présente à sa pensée. Elle suppose que, par un beau jour d’été, se promenant avec lui dans une forêt, elle le quitterait un instant pour se jeter dans de fraîches ondes, vers lesquelles, son luth à la main, elle l’attirerait ensuite, pour lui jeter de l’eau à la face :


Oh ! qu’alors eût l’onde cette efficace
De le pouvoir en Actéon muer,
Non toutefois pour le faire tuer,
Et dévorer à ses chiens comme cerf,
Mais que de moi se sentît être serf ;
Tant que Diane eût contre moi envie
De lui avoir sa puissance ravie.