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LOUISE LABÉ.

Tout en un coup je ris et me larmoie,
Et en plaisir maint grief tourment j’endure ;
Mon bien s’en va, et à jamais il dure ;
Tout en un coup je sèche et je verdoie.


Quelques-unes de ces pièces, il faut le reconnaître, expriment même les transports de la passion dans un langage trop peu discret, qu’accepterait difficilement le lecteur moderne. Nous leur préférons celles où respire, comme dans ces vers, un accent de tendresse mélancolique :


Tant que mes yeux pourront larmes répandre
Pour l’heur passé avec toi regretter,
Et que, pouvant aux soupirs résister,
Pourra ma voix un peu se faire entendre ;

Tant que ma main pourra les cordes tendre
Du mignard luth, pour tes grâces chanter ;
Tant que l’esprit se voudra contenter
De ne vouloir rien, fors que toi, comprendre ;

Je ne souhaite encore point mourir :
Mais quand mes yeux je sentirai tarir,
Ma voix cassée et ma main impuissante,

Et mon esprit, en ce mortel séjour,
Ne pouvant plus montrer signe d’amante,
Prierai la mort de me ravir le jour.


Voici un sonnet d’un ton différent, qui se recommande, à mon gré, par la finesse du tour et la délicatesse de l’expression :


Diane étant en l’épaisseur d’un bois,
Après avoir mainte bête amenée,