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PIERRE RAMUS.

prunte ses meilleures armes pour le combattre, en méconnaissant la grandeur de son génie, l’originalité et la vaste compréhension de ses livres de logique, en confondant, par l’effet de l’ardeur polémique qui l’entraîne, la scolastique et le péripatétisme dans une même condamnation. Il a témoigné notamment une prévention aveugle quand il le décrie comme moraliste et n’hésite pas à le déclarer athée. Sur tous ces points, l’apologiste de Ramus ne lui fait nullement grâce. Pourquoi faut-il, ajoute M. Waddington, après avoir signalé ce qui était le côté faible de ce personnage, qu’à son incomparable hardiesse il ne lui ait pas été donné de joindre une plus grande profondeur ! Il n’en est pas moins vrai que, le premier depuis Aristote, par un service éminent rendu à l’art de penser, il a fait de la méthode un chapitre et même un chapitre très-important de la logique, dont il a établi les règles sur l’ascendant souverain du bon sens, non sur l’autorité d’aucun philosophe. Dans cette noble entreprise, il a lutté contre le torrent, en soutenant sans fléchir le poids des attaques et des haines, en s’exposant aux plus terribles vengeances. Qu’il lui en soit tenu compte, pour le pardon de ses exagérations et de ses méprises. Approprié au temps où il vivait, son esprit, critique à l’excès, l’a nécessairement trompé plus d’une fois, en s’appliquant non-seulement à la philosophie, mais à toutes les branches des connaissances humaines. On n’ignore pas qu’il voulut bouleverser l’orthographe, en la conformant à la prononciation : tentative renouvelée depuis sans plus d’à-propos et de succès, qui