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PIERRE RAMUS.

et très-souvent même, payé son tribut à Terreur ! La thèse, soutenue avec talent, fut néanmoins agréée, et tout d’abord elle fit une réputation à son auteur, mais une de ces réputations ambiguës qui suscitent la controverse et qui excluent nécessairement le repos.

C’en était fait désormais de celui de Ramus ; et il n’en pouvait être autrement, puisque, rompant avec le passé, il soulevait la foule toujours grande de ceux qui pensent d’après leurs devanciers. La philosophie du moyen âge n’avait guère été, pour presque tous ses prosélytes, qu’un immense échafaudage de mots. Épris de l’aimable sagesse de Socrate, instruit par Platon et par Xénophon, mais sans arborer le drapeau d’aucun de ces philosophes, Ramus, par une prétention hardie, faisait appel aux idées dans les leçons qu’il donna, d’abord au collège du Mans, ensuite à celui de l’Ave Maria. Quelle nouveauté choquante, quelle insulte même pour ceux qui avaient vieilli dans l’école, en se bornant à nourrir leur raison de vaines formules ! Un tel homme ne semblait-il pas pour les autres un reproche vivant de la nullité de leurs études ou de leur esprit ? De là, les nombreux contradicteurs qu’il suscita, et de leur part, dès le début, une guerre de libelles, hérissés de cette âpreté pédantesque qui alors était l’accompagnement ordinaire de la science, et qui se montre jusque dans les titres.

Une violente tempête se déclara notamment quand il résuma, en 1543, ses études et son enseignement dans la publication de sa Dialectique et de ses Remarques sur Aristote. Ameutés contre lui, les disciples de