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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

l’eût plongé dans la rivière. » — « Et, dit-il encore ailleurs, il avait fait plusieurs fois, sans dormir et tout en bataillant, des marches de trente-six et même de quarante-huit heures de suite. » Aussi voulait-il que les capitaines s’accoutumassent de bonne heure à pâtir. Ajoutons que le gage le plus sûr du succès en toute chose était, selon Montluc, une conduite irréprochable. « Faites tout ce qui dépend de vous, et placez votre confiance en Dieu », tel est le résumé des préceptes qui ne cessent de revenir sous sa plume. « Dieu n’aide jamais, dit-il, les vicieux et voluptueux ; mais au contraire il assiste toujours auprès de celui qui est vêtu de la robe blanche pleine de loyauté, » qu’il s’applaudit pour lui « d’avoir pu conserver toujours. » C’est ce qui l’autorise à s’attribuer, sans trop de présomption, une action décisive dans tous les événements de guerre auxquels il concourut. S’il se fait ainsi sa part, un peu largement peut-être, ce n’est pas qu’il veuille dérober l’honneur des autres ; c’est qu’il croit « que les historiens, qui n’écrivent que des princes et grands, en parlent assez et passent sous silence ceux qui ne sont pas d’une si grande taille. » Il veut donc à cet égard et en sa faveur rétablir la balance.

À cet effet il cite avec complaisance les bons témoignages rendus à son habileté et à sa valeur, « sans pourtant être, dit-il, ni glorieux ni vantard. » Il se donne aussi pour grand ennemi de la flatterie, mais il ne dissimule pas qu’il soit sensible « à cette gloire qui lui faisait enfler le cœur. » En même temps il n’échappe pas au travers justement signalé par Horace