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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

Quand Dieu nous veut punir, il nous ôte l’entendement. — C’est grande sagesse de bien apprendre et se faire maître aux dépens d’autrui. » On pourrait citer bien d’autres excellents principes d’une application journalière et de maximes bien formulées à recueillir. « Ces petites pointes d’honneur (dit-il en parlant du pouvoir de l’émulation, qu’un bon chef doit entretenir parmi ses soldats) servent beaucoup à la guerre. » Encore Montluc n’établit-il pas seulement des principes fixes, invariables, tels que les suggèrent la pratique et le bon sens. Souvent il discute des plans de conduite avec beaucoup de justesse et d’intérêt. En outre, loin de s’enfermer dans les préceptes de la routine, il accueille avec empressement, il examine avec intelligence toutes les innovations, et s’il tempête contre celle des armes à feu, qui l’ont maltraité, c’est pure boutade[1], et non point qu’il en méconnaisse les avantages, dont il savait très-bien user.

Un illustre auteur[2] a pris soin de disculper à cet égard Montluc, et nous nous bornerons à rapporter ce suffrage imposant. En traitant « du passé et de l’a-

  1. Au nom d’arquebuse, « plût à Dieu, s’écrie Montluc, que ce malheureux instrument n’eût jamais été inventé ; je n’en porterais les marques, lesquelles encore aujourd’hui me rendent languissant, et tant de braves et vaillants hommes ne fussent morts de la main le plus souvent des plus poltrons et plus lâches, qui n’oseraient regarder au visage celui que de loin ils renversent de leurs malheureuses balles par terre. Mais ce sont des artifices du diable pour nous faire entre-tuer. » Il valait donc bien mieux, selon lui, rompre des lances et se porter à terre, d’où l’on se relevait le plus souvent.
  2. Voy. le quatrième volume des Œuvres de Napoléon III, p. 9. In-8°, Amyot, 1856.