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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

les fait tomber du haut en bas un si grand saut, qu’ils ne se peuvent relever. » Rien de plus vrai. On en peut dire autant de cette observation morale, qui témoigne d’une funeste connaissance de la nature humaine : « Il y en a, et trop, qui aiment mieux la ruine et perte de leur maître, que l’honneur, non pas de leur ennemi, mais de leur compagnon. » Un excellent conseil qu’il donne ailleurs, bien qu’il ne soit pas sans y déroger lui-même, se rapporte à la sobriété de la parole. Selon lui, il faut « se mordre la langue plutôt que trop parler. » Et que d’autres judicieuses pensées, bonnes à retenir et surtout à appliquer, ne lui empruntera-t-on pas encore ; on en jugera par les citations suivantes transcrites entre beaucoup d’autres, dignes aussi d’être recueillies : « Dieu nous ferme les yeux quand il nous veut châtier. — Il faut savoir obéir pour savoir après bien commander. — Je craindrais plus un grand seul que non pas deux qui veulent partir le gâteau. » Réflexion dont la justesse était alors confirmée chaque jour par nos guerres civiles. En voici une autre trop justifiée par l’expérience de tous les temps : « Quand un homme pense être hors de ses affaires et qu’il ne songe qu’à se donner du bon temps, c’est alors que lui viennent les plus grands malheurs. — Qui a plus d’honneur doit avoir plus de part à la peine. » À ce compte on envierait moins ceux qui occupent les grands emplois. « Le désir de ceux que nous servons va plus vite que nous ne pouvons. » Réflexion aussi juste que fine, à laquelle se rattache la suivante : « Nous sommes aveuglés quand nous souhaitons quelque chose. —