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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

de Médicis, plus préoccupée des ennemis de l’intérieur (ainsi appelait-elle les huguenots) que de ceux du dehors, lui confia le gouvernement de la Guyenne. Pour lui, déjà vieux, endurci par les travaux, voué au culte étroit de l’obéissance militaire, si voisine de l’obéissance passive, il répugnait fort à la nouveauté des idées, et ceux qui en étaient atteints furent bientôt des coupables à ses yeux. Ces coupables, vainement admonestés, ne trouvèrent pas longtemps grâce devant lui. Aussi put-il dire avec trop de vérité, parlant des huguenots : « Ces gens-là ont toujours eu peur de mon nom en Guyenne, comme ils ont en France peur de celui de Guise. »

« C’est, ajoute-t-il, qu’il peut dire avec vérité qu’il n’y a lieutenant de roi en France qui ait plus fait passer des huguenots par le couteau ou par la corde que lui. » Il n’est pas éloigné de penser que la terreur de ces supplices partout répandue a prévenu une révolution politique autant que religieuse. Car, suivant la confusion d’idées commune en ce temps, les réformés, d’après lui, n’en voulaient pas moins à l’autorité des seigneurs et du roi qu’à celle de l’Église, et les novateurs ne comptaient s’arrêter qu’après avoir changé le gouvernement[1]. Quel double grief, indigne de pardon, auprès de celui qui revendiquait avant tout les deux titres de chrétien et de sujet fidèle !

Pour maintenir l’unité du pouvoir et de la foi rien

  1. Sans être un grand théologien il ne peut croire « que le Saint-Esprit se soit mis parmi ces gens qui s’élevaient contre le roi. »