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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

à son égard ont déjà assez marqué les sentiments. Le duc François de Guise le lui ayant présenté, il le serra dans ses bras et le tint longtemps pressé contre sa poitrine, déclarant qu’il l’avait cru un homme perdu. La conversation la plus affectueuse s’établit ensuite entre le prince, qui voulut entendre le récit détaillé de sa défense, et le capitaine, qui se retira charmé du bon visage de son maître. Celui-ci disait en effet partout « qu’il s’émerveillait de la fortune de Montluc et qu’il le croyait le plus heureux homme du monde, » pour être sorti avec tant d’honneur d’un si long siège et sans espérance de secours,

Montluc, comblé de gloire, mais à bout de forces, depuis près d’un an miné par la maladie, et qui n’avait eu pour se soutenir contre elle que les forces factices d’un courage presque surhumain, avait grand besoin d’un long repos. Mais sa réputation ne lui permit pas d’en jouir. Il n’était que depuis très-peu de temps en Gascogne, auprès de sa famille, lorsque Henri II le rappela par un courrier : c’était pour lui donner l’ordre de se rendre en Piémont, où le maréchal de Brissac l’avait demandé pour le mettre à la tête des gens de pied. Montluc, qui n’avait presque vu ni sa maison ni ses amis, s’en consola par sa considération ordinaire ; c’est qu’il fallait avant tout obéir au puissant aiguillon de l’honneur. Et que pouvait-il refuser au roi, qui lui donna au départ un de ses meilleurs coursiers ? Il ne songea plus qu’à déployer, dès son arrivée en Italie, cette résolution téméraire qui l’avait si bien servi jusque-là : « voulant montrer à