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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

était aussi actif et aussi habile qu’il l’était lui-même, en se demandant ce qu’un intérêt éclairé pouvait inspirer à celui-ci la pensée de faire. « Toutes mes intelligences étaient à songer, et jour et nuit : Qu’est-ce que je ferais si j’étais à la place de mon ennemi ? » Par là il se tenait toujours sur ses gardes, ne cessant de veiller d’une part pour être au fait, par l’entremise de ses émissaires, de toutes les démarches, de tous les projets de l’ennemi ; de l’autre, pour empêcher qu’aucun traître ne surprît ses propres desseins et ne vendît ses secrets.

L’efficacité de son secours, sa supériorité furent bientôt tellement avérées pour tous, que les assiégés, qui n’étaient pas soumis à son autorité, furent les premiers à briguer cette soumission comme leur sauvegarde. Jusque-là en effet, comme Montluc n’était que le lieutenant d’un roi allié, ils ne relevaient pas directement de lui. Les brillants services qu’il ne cessait de leur rendre firent naître la pensée de réunir tous les pouvoirs entre ses mains. Tout récemment encore, une escalade tentée la nuit pour enlever la citadelle et un fort qui donnait accès dans la ville avait été repoussée au grand détriment de l’ennemi. On annonçait que, pour réparer cet échec, le marquis de Marignan faisait venir de Florence une artillerie complète. C’était le 20 janvier 1555. Dès le commencement de février il était proclamé dictateur par les Siennois[1] : comme tel, il n’avait plus, ainsi que par le passé, à s’entendre

  1. Cette nomination était d’ailleurs réduite au délai d’un mois.