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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

selon le propre de la renommée, on grossissait encore celle de ses faits de guerre : « Pour une chose que j’avais faite, on m’en voulait faire accroire quatre. » Mais cette réputation, par combien de fatigues et de périls l’avait-il achetée ? « Jamais homme, a-t-il pu dire, n’en eut à pire marché que moi. » Il cite un autre cavalier et lui-même comme « les deux gentilshommes vivants qui se sont trouvés en plus de combats ; » et il ajoute : « Jamais il ne fut blessé qu’on sache, qu’à la bataille de Saint-Denis ; je n’ai pas été si heureux en cela que lui. »

Nous franchissons quelques années pour arriver à l’une de celles qui ont été les plus actives dans la vie de Montluc. En 1536, il possédait le titre de lieutenant de la compagnie légionnaire du Languedoc, lorsque Charles-Quint envahit la Provence. La circonstance était critique. Par plusieurs factions (ainsi appelait-on les prouesses) il incommoda notablement les troupes de l’empereur en détruisant les moulins d’Auriole, situés entre Aix et Marseille, dont on avait besoin pour l’approvisionnement du pain. Ces hardis coups de main, dont le succès était difficile, et que Montluc a racontés avec beaucoup de détails dans le premier livre de ses commentaires, eurent pour effet heureux d’affamer les ennemis et de les faire songer à la retraite.

À quelques années de là, en 1543, la présence du comte d’Enghien dans le Piémont fournit à Montluc une nouvelle occasion de se signaler. Le jeune général jugeait l’occasion favorable pour en venir aux mains avec l’ennemi : mais les ordres précis de la cour arrê-