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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

mettre sur le point de l’honneur, » pourvu, s’empressait-il d’ajouter, « qu’il n’y eût honte toute découverte. » Singulier mélange d’emportement, de calme et d’astuce, qui convenait à merveille au genre de guerre en usage à cette époque. Dans ses rapports avec ses soldats et ses subordonnés en général, il joignait aussi, de la manière la plus efficace, à la brusquerie et à la violence, l’adresse et l’insinuation, malmenant ou caressant tour à tour, suivant l’occasion, ceux qu’il avait sous ses ordres ; ne se laissant jamais d’ailleurs, on l’a déjà vu, détourner de ce qui était utile par ce qui pouvait être agréable, et n’écoutant l’amour et toute autre passion que quand il était de loisir.

Avec ce courage intelligent on ne sera pas surpris qu’il aimât les braves retraites presque à l’égal des marches triomphantes. Lui-même s’est félicité d’en avoir accompli qui ne méritaient pas moins d’éloges que des victoires. Et dans les unes et les autres, en effet, il faisait preuve des mêmes qualités ; en premier lieu, d’une volonté indomptable servie par un corps de fer ; car en dépit des maladies, qui ne laissèrent pas pour lui d’être graves et nombreuses, il l’avait plié à la patience de toutes les fatigues. À plus de cinquante ans il était homme à marcher encore au besoin et jour et nuit ; on le voit faire vingt-sept milles sans s’arrêter. Aussi a-t-il renfermé en peu de mots le secret de tous ses succès : « Le plus souvent je veillais lorsque les autres étaient en repos, sans crainte du froid ni du chaud ; j’étais endurci à la peine. » Et dans sa vie des camps il lui est arrivé bien souvent, dit-il