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LE MARÉCHAL DE MONTLUC.

rieux, en pouvant dire de lui : « Je m’étonne que je n’y demeurai, mais mon heure n’était pas venue. »

Il serait trop long de suivre dès lors Montluc dans ses expéditions journalières, dont ses commentaires n’ont pu même nous offrir le récit en détail[1]. Bornons-nous, sans nous attacher à tous ses pas, aux principaux événements de sa vie militaire : à cet égard encore nous aurons beaucoup de peine, dans une carrière si remplie, à ne pas paraître trop incomplet ; mais dans des récits si multiples, cherchons du moins à saisir les caractères généraux, les traits distinctifs de cette puissante nature, qui a son rang marqué dans notre histoire.

« Bien que le naturel de Montluc, ainsi qu’il s’est exprimé lui-même, tendît spécialement à remuer les mains, » et qu’il aimât par-dessus tout « à frapper et jouer des couteaux, » on aurait tort de se le représenter uniquement dans cette attitude de lutte et de violence. Il n’était pas incapable, tant s’en faut, d’une réflexion circonspecte qui lui liait les mains « quand les affaires du maître le demandaient. » En un mot, ce qu’il exécutait avec fougue, il le concevait avec prudence. S’il devenait téméraire, c’était donc à bon escient et à propos, tout prêt, dans un intérêt différent, à changer de conduite. Il n’hésita pas à dire, avec le dévouement loyal du bon serviteur, que, « selon lui, il valait mieux faire les affaires de son maître sans se

  1. « Ce ne serait jamais fait, a-t-il dit, si je voulais écrire tous les combats où je me suis trouvé. »