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HONORÉ D’URFÉ.

fous d’avoir révisé des titres trop complètement oubliés. L’œuvre ne demandait pas peu de dévouement et de patience : car la Sylvanire seule de d’Urfé contient neuf mille vers ; et l’on jugera sans doute que le critique a montré un rare courage en étudiant jusqu’au bout cette pastorale, écrite en vers non rimés, puisqu’à raison de cette dernière circonstance elle lui a fait éprouver, comme il l’atteste, neuf mille déceptions. D’Urfé a chanté en outre dans le Sireine[1] un amour constant et malheureux. Des paraphrases de psaumes et d’autres poésies sacrées sont enfin, avec quelques pièces inédites d’un genre différent[2], sorties de sa plume féconde.

Ces travaux, quoiqu’ils aient paru assez tard, datent pour la plupart de la jeunesse de d’Urfé. Combien alors les destinées de la poésie n’étaient-elles pas parmi nous incertaines et flottantes ? On s’égarait par défaut de naturel : Amour, s’écrie d’Urfé, en commençant le récit des malheurs de son berger :


Amour, qui seul en fus l’auteur,
Laisse pour quelque temps mon cœur,
Et viens sur ma langue les dire ;


On ne s’égarait pas moins par une recherche minutieuse et peu intelligente des effets de la nature. M. Bonafous nous offre de cette prétention malheu-

  1. Et non la Syreine, comme le dit la Biographie universelle : Sireine est le nom d’un berger.
  2. Notamment la Savoysiade, poëme que l’auteur n’eut pas le loisir de terminer et qui est resté manuscrit.