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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

cueil de ces pièces existe encore[1] ; mais parmi elles il n’en est aucune qui égale la brièveté expressive de celle de mademoiselle de Gournay. Avec autant de bonheur une jeune princesse, trop tôt enlevée aux arts, a reproduit de nos jours, par le ciseau, la physionomie tendre et fière de cette fille héroïque du peuple. Il semble que ce quatrain ait été une définition anticipée du touchant chef-d’œuvre de Marie d’Orléans.

Frappée, au reste, de la gloire nationale attachée au nom de Jeanne d’Arc, mademoiselle de Gournay lui à fréquemment rendu d’autres hommages, et l’on peut citer encore ce quatrain, empreint d’énergie et de noblesse, qu’elle a composé en l’honneur de cette amazone :


Les grands peuples lointains, de gloire ambitieux,
Accouraient au secours de la France opprimée ;
Soudain, comme un tonnerre, on oit ce cri des cieux :
Peuples, reposez-vous ; la pucelle est armée.


Ces vers, au dire de mademoiselle de Gournay, étaient comme une aurore du soleil qui allait enfin éclairer, grâce au poëme de Chapelain, une mémoire doublement sûre de vivre. En exprimant cet espoir, elle appelait de ses vœux l’œuvre longuement attendue : on sait toutefois que la réputation de Jeanne devait être peu servie par ceux qui l’ont chantée, et notamment par le poëme de la Pucelle.

On peut juger, d’après ses sympathies littéraires, que

  1. Imprimé à Paris, in-4, 1613 et 1628.