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MADEMOISELLE DE GOURNAY.

pas sans dignité qu’elle parle à ces derniers. Par exemple, transmet-elle à Henri IV, en guise de placet, des vers sur la pucelle d’Orléans ; après avoir dit au prince que cette héroïne fut suscitée pour le salut de son roi comme pour la gloire des lis, elle ajoute :


Mais le ciel, désireux d’illustrer la mémoire
Des actes généreux qui signalent ta gloire,
Une autre dame encore a fait naître en tes jours
Qui pût, de si beaux faits, ourdir un beau discours,
Si ta faveur promise à ses vœux ne refuse
Le calme et le repos nourriciers de la muse[1].


Le cardinal de Richelieu est pareillement célébré dans les Épigrammes. On sait, du reste, qu’il fut son bienfaiteur. Elle comble en lui, d’éloges hyperboliques, le vainqueur de la Rochelle. Quelques-uns de ces vers ont ainsi l’avantage de nous rappeler des noms ou des faits liés à notre histoire, et appartenant surtout au règne de Louis XIII : témoin les suivants, qui ne manquent pas d’élévation et de force, « sur l’heureuse guérison de ce prince à Lyon[2]. »


Ô rois, brisez l’orgueil de vos hautes couronnes,
Augustes majestés, portez le sceptre bas,
Si la grandeur permet que vos frêles personnes
Fondent comme le peuple au gouffre du trépas.

  1. La mort empêcha Henri IV d’accorder à mademoiselle de Gournay
    la pension qu’il lui avait fait espérer et qui ne devait lui être accordée qu’ultérieurement.
  2. 1630.